Il se fait tard, encore une journée agréable en compagnie de Renge et Leilan. Je ne vois plus vraiment le temps passé, mais le soir venu, je suis seul. Je devrais y être habitué, mais bizarrement ce sentiment de solitude s'est accentué depuis quelques temps, c'est surement dû au fait que je passe d'un état de joie à son contraire, la peine et la solitude. Comment puis-je me plaindre ? J'ai pourtant la belle vie ces temps-ci, alors pourquoi ? Pourquoi ne suis-je pas pleinement heureux ? J'ai comme l'impression d'être incomplet, de ne plus être moi-même la journée, est-ce une bonne chose ?...

Je m'allonge, le lit est toujours aussi peu confortable, enfin c'est ce que j'aurais dit d'habitude, avant, j'aimais trouver des défauts aux choses, comme si je me refusais d'être bien, c'est idiot n'est-ce pas ? Ne pas profiter d'un lit par simple esprit de contradiction. J'attends, les yeux fermés, sur le dos, j'attends que le sommeil vienne, élément si indispensable qui semble vouloir m'éviter depuis toujours, j'ai beau attendre des heures et des heures, je ne peux trouver l'apaisement, comme quoi, les choses vont dans les deux sens, même le bien-être m'évite ! Si je ne peux dormir, autant penser, mais penser à quoi ? N'importe qui penserait à des choses joyeuses, je pourrais donc penser au bonheur que je vis depuis des mois aux côtés de Leilan ainsi que de Renge, ça serait une chose naturelle et logique, et pourtant.. Je n'arrive jamais à penser à ce bonheur, la seule chose qui me vient à l'esprit, c'est cet accident, ce souvenir qui me hante et qui me fait haïr les akumas ainsi que le comte, on peut dire que je cauchemarde éveillé. J'aimerais tant, tant penser à autre chose, j'aimerais tellement pouvoir oublier mon passé pour vivre le présent, mais je n'y arrive pas, j'aurai être aimé, je serai toujours prisonnier des chaînes de mon passé.

Mais, quel est cet accident dont je parle tant ? A vrai dire, je ne m'en souviens jamais vraiment en entier, je revois seulement le pire moment, l'instant où ma soeur se fait tuer par les akumas. Je peux me souvenir parfaitement de chaque détail, chaque arbre, chaque bâtiment détruits, la forme de l'Eglise ou même des quelques pierres sur le sol. Mais la chose la plus troublante dont je ne me rappelle que depuis peu, c'est cette brume étrange, ce nuage fin qui couvre la scène.. J'ai du mal à me l'avouer mais je connais cette brume ou du moins, je l'ai déjà vue ailleurs, dans un autre souvenir de mon passé, l'un des pires, l'accident de mes parents. L'accident avait eu lieu à cause de cette même brume, cela pouvait-il être qu'une simple coïncidence ? Ou était-ce de ma faute... Je sais que ces akumas étaient là pour l'Innocence, du moins je ne vois pas d'autres raisons. Si je n'avais pas existé, l'Innocence ne m'aurait jamais choisie et ces akumas n'auraient jamais attaqué ma famille... Mais je ne peux me résoudre à mourir maintenant, je l'ai promis.
Il y a une chose dont je me rends compte, je suis heureux certes, mais être heureux a eu une conséquence sur moi, je n'avance plus. Peu à peu, j'oublie, je passe à autre chose, j'oublie la promesse que je me suis faite qui était de venger ma famille... Je ne peux oublier cette promesse. Mais, je veux honorer mon passé sans rejeter le présent, je dois trouver des réponses, une fois que ce sera fait, peut être trouverais-je l'apaisement que je cherche tant.

C'est ainsi que je décidai le lendemain, de partir à la chasse aux réponses, mais où aller les chercher ? Je ne voyais qu'un seul lieu, le lieu où tout s'est déroulé, l'église où s'est mariée ma soeur. Il serait facile de convaincre Komui de me laisser y aller, mais Leilan ne me laisserait jamais y aller seul, elle voudrait m'y accompagner... J'allai donc demander à Komui de me simuler une mission pour qu'elle me laisse partir. Sauf que cet idiot me dit qu'il me fallait un coéquipier, qui choisir ? Je ne voyais qu'une seule autre personne digne de confiance, Renge. Mais je pouvais attendre que Komui lui demande de venir avec moi, je partais donc en avance, sans prévenir personne aux Etats-Unis d'Amérique, c'est là-bas que la scène avait eu lieue. Puis je me rendis dans le petit village dans lequel j'avais vécu, je n'y étais pas allé depuis.... Bref passons, revoir ce paysage me fit me sentir mal, les mauvais souvenirs avaient écrasé les bons, puis plus j'avançais vers l'Eglise, plus je revoyais le sol tâché de sang, les maisons détruites, je pouvais entendre de nouveaux ces cris de détresse, ces pleurs, ces appels à l'aide... Pourquoi suis-je le seul à avoir survécu à ce massacre ? J'aurais tellement voulu mourir à la place des autres, mais je n'ai sauvé personne, c'est pour cela, que même derrière cette carapace froide et épaisse, je fais tout pour sauver les gens qui m'entourent, il faut que je réussisse là où j'ai échoué dans le passé.

Une fois sur les lieux du crime, il n'y a rien, l'Eglise a été reconstruite, le sol n'est plus tâché de sang, plus aucun bruit, comme si ce massacre n'avait jamais eu lieu. Mais je tremblais tout de même, les larmes me venaient déjà, c'était plus dure que ce à quoi je m'attendais, mais il m'était impossible de repartir maintenant, si je n'agissais pas aujourd'hui, je n'arriverai jamais à le faire. J'allais entré dans l'Eglise quand j'entendis des bruits de pas, j'en déduis facilement que c'était ma coéquipière, malheureusement, je ne pouvais me retourner maintenant, j'étais en sanglot, si elle me voyait comme ça, j'aurais le droit à de la compassion, et ceci je dois me l'interdire, surtout ici. Je lui dis sans me retourner, en essayant de garder une voix neutre comme je peux :

Tu dois surement savoir pourquoi tu es ici, inspecte les lieux et viens me voir si tu trouves quelque chose d'intéressant.

Ensuite, je rentrais rapidement dans l'église puis j'allais m'asseoir pour prier, chose que je faisais bien pour la première fois, mais il fallait que je le fasse, c'était une marque de respect que je me devais de rendre aux victimes de ce massacre.